👁️ Critique Théâtre - ADN
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Il y a des pièces qui vous parlent avant même de les avoir vues. Au cours du festival d'Avignon de 2021, le spectacle "ADN" a effleuré ma curiosité mais par manque de temps, je n'ai malheureusement pas pu le voir. J'étais donc ravie d'apprendre qu'il revenait pour quelques dates à Paris. Pour sa première mise en scène, Marie Mahé s'est lancée le défi d'adapter ce texte de Dennis Kelly et cela promettait de belles surprises.
Je vous dis tout, dans les moindre détails, ou presque ...
ADN vu par l'Oeil de S
Le texte de Dennis Kelly est riche, aussi bien dans ses sujets que dans ses mots et ses phrasés. Le traduire n'a pas dû être une mince affaire ! Philippe Le Moine réussit à transposer avec brio les dialogues aux phrases à suspens qui titillent notre intérêt et leur donne un rythme soutenu. L'adaptation et la mise en scène de Marie Mahé sont, quant à elles, percutantes ! Elle nous immisce au sein de ce groupe d'adolescents avec ingéniosité tout en posant avec intensité le problème du harcèlement en milieu scolaire et de la violence. Elle nous interpelle également avec subtilité sur le comportement animal de l'être humain qu'elle met en abyme avec finesse et virtuosité. Des rires gênés s'échappent par de ci de là, mais une tension palpable domine aussi bien sur scène qu'au sein du public. Il règne dans l'atmosphère à la fois mal à l'aise et fascination : c'est brillant ! La scénographie est, quant à elle, d'une belle inventivité laissant un flottement sur le lieu exact où se déroule l'action : notre imagination est donc suscitée pour notre plus grand plaisir. Elle est complétée par des lumières divinement efficaces jonglant entre un halo rouge sang et une vive lumière blanche tel l'enfer et le paradis, l'ange et le démon ...
Sur scène, nous découvrons quatre comédiens très investis et incroyablement bien dirigés. Nous retrouvons Tigran Mekhitarian (en alternance avec Achille Reggiani) qui nous offre un jeu à la fois déboussolant et captivant de justesse. A ses côtés, Maxime Boutéraon nous livre avec une passivité impressionnante, des silences qui en disent beaucoup à travers un simple mouvement des yeux : son interprétation est à la fois angoissante et subjuguante. Marie Mahé et Léa Luce Busato nous servent au travers de leurs personnages avec un délicieux brin de folie, des sentiments et émotions tels que la panique, l'incompréhension, la solitude ou encore la culpabilité. Elles nous envoûtent de leurs magnifiques nuances reflétant astucieusement les nombreux quiproquos de l'intrigue : c'est déroutant !
En Bref.
Au delà de l'incroyable plume incisive de Dennis Kelly, la jeune metteuse en scène, Marie Mahé, nous propose une tragédie des temps modernes attractive qui nous saisit du début à la fin et nous interroge sur l'être humain à travers des réalités frappantes de notre société. Menée tambour battant par des comédiens talentueux, d'une maturité délectable et d'une justesse enivrante, cette pièce intergénérationnelle et essentielle saura vous attraper au vol ! Foncez, je n'ai pas d'autres mots.
Actuellement au Théâtre La Tempête jusqu'au 19 mars.
Le 21 et 22 mars au Théâtre Lepic